Comme j’en avais assez de chanter et danser toute seule comme une idiote dans le salon et qu’il n’y a pas assez de mariages/bac/thourat/fiançailles/mlek et sahryét tout court cet été, j’ai décidé de faire la fête toute seule et j’ai ouvert mon propre kafichanta ici :
http://kafichanta.blogspot.com/
alors, qui vient danser avec moi ?
Petite tribune personnelle pour exprimer un avis tout subjectif qu’il est, partager une idée, donner de bons tuyaux, relayer une info, se décharger, quitte à divaguer parfois.
Petite communauté virtuelle faisant le bonheur de tous ceux qui veulent apprendre à cohabiter, réunissant autant de voix, de pluralité, d’univers jusqu’à la discordance.
Echange, communication,
Partage des idées, discussions constructives ou pas
Plaisir de lire et de découvrir
Bonne humeur et belles parties de fous rires
Enrichissement, kiltiration et autre activité en tout genre
Marmite gigantesque ou chacun trouve son bonheur
Chakchouka à laquelle chacun viendrait ajouter son ingrédient
Jarida online sur laquelle on vient récolter les nouvelles, tâter le pouls, retrouver avec bonheur les tribunes appréciées, aimées et amies
Coups de foudre virtuels pour les mots d’un tel
Affinités
Se rassembler autour d’idées
Quitte à avoir un semblant de sentiment d’appartenance
Continuer à faire entendre sa voix dans la cacophonie générale
Et parfois
Se retrouver dans la mêlée d’un jour de souk
Ou
Se retrouver sur la touche soit par choix soit parce que l’on n’y comprend rien et que cela dépasse l’entendement.
Ecrire dans le vent parce personne ne semble y prêter attention, d’essayer de passer à autre chose, que c’est seulement passager,
Ne pas fermer les yeux en priant pour que cela soit un canular
Mais juste une réalité sociale que l'on voudrait essayer de changer doucement mais surement
Ne pas avoir mal au cœur quand certains, dans l’ombre, s’en frottent les mains.
Un a déjà plié bagages et quitté la communauté, l’autre se prépare à prendre le même chemin.
-Dis, je peux dire une connerie?
- Vas-y, tu ne fais que ça à longueur de journée.
-je voudrais parler de sujets importants, qui me touchent, je voudrais exposer mon avis, en discuter….
-oh oh oh !!!! parler, Discuter, exprimer ?
C'est bien beau tout ça mais est –ce que tes idées sont recevables ?
-hein ?
-sont-elles correctes aux regards des mœurs, des opinions dominantes, de l'éthique, de la bienséance, de la morale bien pensante ?
Sont-elles conformes aux idées du jour ?
-hein ?
-Contiennent-elles une quelconque hostilité, une atteinte à la sensibilité/sensiblerie de ton prochain, un anticonformisme, une idée/brebis galeuse qui risque d'infecter la collectivité ? Pas d'irrévérence, de grossièreté, pas d'allusion déplacée, de manque de respect et provocation de tout genre !
Ne malmène pas tes pauvres lecteurs et les âmes sensibles, voyons !
-Mais enfin, laisse-moi….
-Ont-elles passé avec succès le test de la « langage d'ébène » ?
-le test de quoi ?
-t'es vraiment nulle. Je te parle du "blenz", idiote !
Jamais entendu parler bien sûr ?
-euh, non…enfin, si mais…
- ça consiste à tourner ta langue 46800764313468909 dans ta bouche avant de l'ouvrir !
- mais de quoi vais-je parler si tout doit passer par ton test ?
euh, je peux parler d'amour ?
-hum, lequel ?
Maternel, paternel, de la mère patrie?, …sinon c'est irrecevable !
- ????? Bon, de sexualité
- niet ! à moins que tu ne veuilles parler de celles des escargots ? Elle est bien plus intéressante et éducative, crois-moi !
-mais enfin !!!
- prends exemple sur tvWVTF, petite !
-de sida et mst ?
-hors sujet,ça n'existe pas !
-bon ! D’idéologies ?
- pourquoi ne parles tu pas du feuilleton "nour" ?
-de régionalisme ?
-ou vois-tu du régionalisme, voyons ?
-de discrimination ?
-tu te fous de moi ? Ce mot n'est plus d'actualité. On est passé à la discrimination positive, ma vieille, réveille-toi ! plus personne ne s’en plaint.
-la quoi ?? bon, de la politique de l'Equateur ?
- pourquoi ? Tout va bien chez eux. Tu nous cherche un clash diplomatique avec ce pays!
- de religion ?
-Non, non, non ! Puis tu es nulle en la matière ! Laisse faire les connaisseurs.
-de pauvreté ?
-c'est quoi ça?, on dit personnes ayant peu de ressources. Il n'y plus de pauvres de toute manière, le dernier est mort il y a quelques jours!
- ? De conflits armés?
-ou vois-tu tout ça ? Et puis on dit divergences d'opinions et problèmes d'ordre économique et démographique.
-politique étrangère ?
-pourquoi faire ?y a bien des ministres pour ca!
-oui, mais…. Bon, de harragas
-on ne parle pas de harragas. Personne ne veut immigrer, tout le monde est content d'être chez soi. Ou alors, parle de l'émigration des hirondelles au printemps, c'est joli ça comme sujet.
-……… de culture alors ?
- oui , de pommes de terre, irriguée, microbienne, physique, goutte à goute…
-de la condition de la femme ?
-oui, bien sur, de mode, de soldes, de mariage, d'enfants mais pas de prise de poids, pas de célibat, de …
-ça va ! De l'homme alors ?
-oui dans une certaine mesure, contente-toi de parler foot, de bouffe, bref, reste dans la caricature, compris ?
-faits de société ?
-rien à signaler de ce côté, passe ton chemin !
-…………………. De littérature ?
-là, tu peux parler, tout le monde s'en fout.
-ah enfin !!!!!
-donc pour récapituler : pas la sexualité, ni de régionalisme, ni de religion, ni de culture, ni d’histoire, ni de ………. ni de … ni de… et encore moins de ……… et de………. tout le reste et autre pensée conforme, tu peux en parler en toute sécurité.
Tu as saisi ?
-………..jhfiuytpiurehnvvbkhgeiugeohbel kfuiiuyifbhgvjhgruhg !!!!!!!….………………………………………………………………………………………..
-quoi? Tu m'insultes la?
-…..
-Dis, je peux dire une connerie ?
-oui, vas-y !
-je peux encore dire qu’un œuf est un œuf ?
-bah, assure-toi d’abord qu’il n’appartient à aucune ligue de défense des droits et de la non discrimination des œufs bafoués avant de l’ouvrir , sinon ferme-là!
Après avoir compté le nombre de disputes pour divergence d'opinions, de criailleries, d'énervement et de guerres déclarées, d'accidentés, de blessés graves et de sentiments d'amour propore and co plus que super froissés et profondément amochés,
après avoir vérifié la quantité d'énergie perdue en bataille rangée par blogs interposés
les efforts de quelques ambassadeurs et autres diplomates proposant l'armistice
ET
Comme je me fais peut être trop sensible, 5néna, trop sentimentale à force de pleurer devant tous les films parlant de bons sentiments, de bonheur, d’union et d’amour collectif, et encore plus naïve et mickey que d’habitude et que j’ai la larme facile (pas assez de papier mouchoir dans mon bled !)
Comme je n’ai aucune idéologie à défendre bec et ongle, à mourir pour, à me mettre à dos tout le monde à coup de crêpage de chignons, de noms d’oiseaux qui volent et de coups de poings dans la gueule et que je n’aime pas les boxes de ring même virtuels
Et que j’ai du mal à choisir parmi les choix proposés dans la catégorie déteste-moi, moi encore plus ! dans MA blogosphère aujourd’hui, aucun rang auquel me joindre (dites moi, y-a-t-il d’un coté ou de l’autre des belligérants, quelqu'un ou une équipe qui aurait besoin d’un coup de main ?)
Que je n’ai personne à soutenir dans sa petite croisade personnelle (qui veut de moi, amane? je peux aider de ma voix, de mon vote, de mon commentaire encore plus méchant et virulent que les précédants ?je sais m’y faire quand il faut gueuler plus fort que les autres sur tout et n’importe koi)
Comme je n’ai personne avec qui me disputer, personne à insulter, à maudire, à vouer aux gémonies, à vouloir fracasser contre le mur, à haïr, à juger, à mépriser (manifestez-vous, on se bagarre quand vous voulez, on se traine même dans la boue, allez, soyez pas timides !)
Et que je n’ai personne à aimer et de qui je suis aimée (à part les vieux de la vieille qui se comptent sur les doigts de la main)
Que je me sens fatiguée et triste face à ce constat
Voilà ce que je peux vous proposer : un peu d’amour collectif, universel, désintéressé à vous communiquer et des boussét bel gaufrettes rien que pour aujourd’hui.
(merci à moula el gatous pour la formule aux gaufrettes et pas d’arrière pensée et encore moins de proposition indécente!!!!……. Quoique, après coup….)
On reprendra les bagarres, les arrachages de cheveux, les je te déteste/je t’aime, moi non plus et autres guerres intestines un autre jour avec grand plaisir. ;)
un joyeux anniversaire, à mon support (1) et à mon oreille attentive(2 il se reconnaitra s'il veut bien revenir à la civilisation) ou kol 3am wentouma bkhir.
Tu es curieux, tu aimes les spy games, ou etmout 3ala etnassniss ?
Alors ceci te concerne.
Tu voudrais tout connaitre sur tout le monde, savoir qui est qui, qui fait quoi, avec qui, quand, comment et pourquoi?
Tu voudrais découvrir les identités de ceux qui tu connais virtuellement parce que tu es friand de détails intimes des autres?
Tu voudrais mettre des noms sur des visages, et vice versa, savoir qui ressemble à qui et à quoi ?
Tu voudrais découvrir le lien entre X et Z sans trop te casser les pieds ou te faire prendre en pleine séance d’espionnage ou 9il ou 9al ou fthaya7 ou kachfen 7al?
Ou encore savoir si XX et Zy préparent u truc sans t’en parler pour le week end, écrivent des trucs pas sympas (mais alors là pas du tout) sur toi, si tu as raté une séance de déchirages et déplumages (ça c’est la version arabe) ou casser du sucre sur ton dos (version française) ?
Ou alors tu voudrais débusquer les plus farouches, se cachant derrière des psydinimes kima 9al le5er et qui se disent résolument attachés à leur anonymat et autre jardin secret?
Sur le net/village, il y a ce qu’il faut, de tout et même beaucoup trop de bruit pour rien. Il suffit simplement de se munir d’une souris et que le jeu commence. Le monde est à un écran près.
Les blogs, sites, forums et ce qu’on appelle le social networking sont faits pour ça. D’ailleurs, les uns sont les antichambres des autres. Il est recommandé d’être patient et faire fonctionner ses méninges.
Il faut juste savoir que ça se pratique dans les deux sens :
-Soit, on devient super épieur amateur, (le but du jeu) souvent sans forcement le vouloir (bah, voyons) en deux cliques quitte à se retrouver propulsé dans l’intimité/exhibitionnisme (le paradoxe marrant) des gens, à baver sur les photos de XYT lancés sur la place publique et à découvrir la bande de copains de HGF, à faire cache-cache avec les plus récalcitrants, à connaître à force de lire et de farfouiller ce que fait un tel et un tel dans les moindres détails(voire même noumrou essabat) et parfois à la seconde même.
Tiens, rien que pour le cas de facebouk ou oumek et toute la famille( ceci n'est pas une injure, je tiens à le préciser), et en circulant dans un des groupes crées sur cette plateforme, je suis tombée sur des bloggeurs super attachés à leur anonymat, sur l’ex d’une ex d’un ex d’une copine quoique ça ne me regarde pas trop (mais si mais si), sur le père du cousin par alliance de la tante de ma collègue, sur le futur ex d’une amie à mon frère, sur le boucher du coin, sur le plombier de la voisine de palier de mon beau-père, sur les préférences de tout ordre de XYT et ceux qui pratiquent des activités en groupe en tout genre ( ?!Je n’avais vraiment pas besoin de savoir ça).
Qui peut encore parler de privacy sur ce truc ? On y rentre comme dans un moulin même quand on n’y est pas convié !
-Soit, on devient épié, sans le chercher ou au contraire en s’y abandonnant avec délice (hum).
Ou alors carrément les deux. Il suffit de regrouper ou de laisser trainer les « indices » et le tour est joué. Le lien est vite fait surtout si l’on s’expose sciemment. Tu vois comme c’est facile. Alors, heureux ?
You spy on me, I spy on you and someone else is spying on you -ou che5et ellila-involontairement ou non. C’est la technique de l’arroseur arrosé. Bref, tout le monde sait tout sur tout le monde.
Et nous nous croyons à l’abri d’un éventuel voyeur/épieur, derrière des pseudos et de fausses pistes, préservant nos petits secrets tout en éparpillant quelques-uns au passage, ici et là.
Personne ne peut (plus) se cacher du moment qu’il a accepté de jouer le jeu. Sauf que le dit jeu peut s’avérer parfois disons, désagréable voire porteur à conséquences, si on se lance dedans sans une certaine lucidité et sans avoir accepté les règles au préalable.
On en vient presque à regretter son anonymat après que le train ait sifflé (à traduire)
Quelle est la limite entre domaine public et privé dans tout ça ?
Qui penserait encore venir parler d’anonymat et de droit à la vie privé dans ce cas?
Smile and welcome to the village.
Notre sympathique et bienveillant chauffard a encore frappé. Cette fois, les accidentés sont ici, ici et ici
Ça finit par devenir aberrant et pathétique.
La nature de la « sanction » me fait sourire. Cela n’arrêtera pas ces personnes d’écrire, de poster, de penser, d’en parler, de vivre et surtout d’être LUS.
Pourquoi continue-t-on à être punis comme des gamins ayant fait quelques bêtises ?
Et QUAND arrêtera-t-on de le faire?
C’est ce qui s’appelle prendre les gens pour des cons, des immatures, des incapables, des imbéciles prêchant dans le désert, que l’on ne considère même pas comme des vis-à-vis et que l’on traiterait comme tels. Ça force mon admiration du coup !!!!!!!!!!!!!
Mais suis-je bête, depuis quand joue-t-on franc jeu ?
-« tu te crois malin, tu veux parler ? Et bah voilà, t’es puni ! » dixit l’ombrageux et colérique Mr Ammar, que je salue au passage et que je remercie pour ses fréquents passages chez moi. D’ailleurs, je ne sais même pas pourquoi il m’honore de ses visites, je n’écris que des conneries pseudo-poétiques wala même la poésie est devenue tabou et menacerait l’ordre des choses ?
Aurait-on- peur, à ce point, des mots, de la Vérité ?
En quoi énoncer de simples EVIDENCES connus de TOUS fait-il d’eux des empêcheurs de tourner en rond ?
Qui de ces trois bloggeurs, représente-t-il une menace ? ils devraient se sentir honorés dans ce cas de faire partie des perturbateurs ( mot très significatif et fortement symbolique mais déjà entendu quelque part), non ?
Auraient-ils- tant de poids pour galvaniser les foules ?
Mais je divague, ma parole ; quelles foules, celles qui font la queue à Carrefour ou celles qui se réjouissent trop bruyamment d’un match gagné ?ou celles qui pensent à leurs vacances d’été bien méritées quand d’autres protestent pour avoir du boulot ?
En tout cas, ce n’est surement pas avec cette façon de procéder que l’on arrêtera d’écrire, y a qu’à relire ses manuels d’histoire !
Je vais retourner à ma petite vie, à mes histoires et à ma poésie à deux balles, à mes étudiants de 20 ans et des poussières qui n’arrivent pas à écrire correctement une phrase en français, qui ne savent même pas ce que le code du statut personnel veut bien vouloir dire, qui butent sur la date de l‘indépendance de leur pays, qui pensent que la femme représente un fléau pour la société et qui croient pour pas mal d'entre eux que les partis de gauche en France sont fait de SUNNITES et de SHIITES
à m’occuper pleinement de mes prochaines sorties dans les endroits les plus branchés ou je pourrais briller en société et me chercher un bon parti et à m’étourdir de conversations passionnantes sur les dernières nouveautés vestimentaires
et à savoir si Flena va épouser Flen dans le dernier feuilleton à la mode qui tient en haleine tout le monde arabe-ma sœur y compris-
au lieu de me prendre la tête à ironiser sur de sempiternelles (mais pourtant tellement évidentes) questions et à vouloir réfléchir autrement.
D’ailleurs, c’est ce qu’ON nous demande de faire.
Alors, trois bloggeurs ou 600 « empêchés » (la belle plaisanterie !) d’être lus, ça dérange qui ?
A QUI LE TOUR ?
P.S : ces questions ont oratoires et n’attendent pas de réponse.
Le texte est à prendre au 2ème degré.
Il s’adresse à ceux qui se reconnaitront.
Il n'y pas pire censure que celle que l'on se crée, que l'on dirige contre soi-même.
C'est encore mieux de faire le boulot tout seul comme un grand.
H.1 Essaie quand même...
H.2 Oh non... je ne veux pas...
H.1 Pourquoi? Dis-moi pourquoi?
H.2 Non, ne me force pas...
H.1 C'est donc si terrible?
H.2 Non, pas terrible... ce n'est pas ça...
H.1 Mais qu'est-ce que c'est, alors?
H.2 : C'est... c'est plutôt que ce n'est rien... ce qui s'appelle rien... ce qu'on appelle ainsi... en parler seulement, évoquer ça... ça peut vous entraîner... de quoi on aurait l'air? Personne, du reste... personne ne l'ose... on n'en entend jamais parler...
H.1 : Eh bien, je te demande au nom de tout ce que tu prétends que j'ai été pour toi... au nom de ta mère... de nos parents... je t'adjure solennellement, tu ne peux plus reculer... Qu'est-ce qu'il y a eu? Dis-le... tu me dois ça...
H.2, piteusement : je te dis : ce n’est rien qu’on puisse dire... rien dont il soit permis de parler...
H.1 Allons, vas-y...
H. 2 Eh bien, c'est juste des mots...
H.1 Des mots? Entre nous? Ne me dis pas qu'on a eu des mots... ce n'est pas possible... et je m'en serais souvenu...
H.2 Non, pas des mots comme ça... d'autres mots... pas ceux dont on dit qu'on les a “eus”... Des mots qu'on n'a pas “eus”, justement... On ne sait pas comment ils vous viennent...
Nathalie Sarraute, Pour un oui ou pour un non.
Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys,
Flotte très lentement, couchée en ses longs voiles...
-- On entend dans les bois lointains des hallalis.
Voici plus de mille ans que la triste Ophélie
Passe, fantôme blanc, sur le long fleuve noir;
Voici plus de mille ans que sa douce folie
Murmure sa romance à la brise du soir.
Le vent baise ses seins et déploie en corolle
Ses grands voiles bercés mollement par les eaux;
Les saules frissonnants pleurent sur son épaule,
Sur son grand front rêveur s'inclinent les roseaux.
Les nénuphars froissés soupirent autour d'elle;
Elle éveille parfois, dans un aune qui dort,
Quelque nid, d'où s'échappe un petit frisson d'aile:
-- Un chant mystérieux tombe des astres d'or.
ô pale Ophélia! belle comme la neige!
Oui tu mourus, enfant, par un fleuve emporté!
-- C'est que les vents tombant des grands monts de Norvège
T'avaient parlé tout bas de l'âpre liberté;
C'est qu'un souffle, tordant ta grande chevelure,
A ton esprit rêveur portait d'étranges bruits;
Que ton coeur écoutait le chant de la nature
Dans les plaintes de l'arbre et les soupirs des nuits;
C'est que la voix des mers folles, immense râle,
Brisait ton sein d'enfant, trop humain et trop doux;
C'est qu'un matin d'avril, un beau cavalier pâle,
Un pauvre fou, s'assit muet à tes genoux!
Ciel! Amour! Liberté! Quel rêve, ô pauvre folle!
Tu te fondais à lui comme une neige au feu:
Tes grandes visions étranglaient ta parole
-- Et l'infini terrible effara ton oeil bleu !
-- Et le poète dit qu'aux rayons des étoiles
Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueillis,
Et qu'il a vu sur l'eau, couchée en ses longs voiles,
La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys.
Arthur Rimbaud
